Au début des années 2000 j’avais découvert Bertrand Lherbette à Correns, le «village bio» du pays de l’Argens. Cet angevin apprenait la Provence sous l’aile de Bruno de Lorgues qui avait redonné vie à L’Auberge du Parc, hostellerie XVIIIe au cœur du village. Il prenait le terroir dans le sens du bio et du gourmand – brouillade aux truffes d’été, ravioles de courge, jarret de veau braisé, lapin à l’estragon… – avant gagner Sillans-la-Cascade, à l’Hôtel-restaurant Les Pins où son chou farci à la truffe d’automne et son pot au feu des mers au pistou et safran faisaient merveille.
Après d’autres épisodes à Aix en Provence et au Lavandou, le voici depuis deux ans dans son restaurant proche de l’opéra où sa cuisine qui a bien voyagé le distingue du tout venant. Salle à la fresque romantique, une seconde plus dépouillée en sous-sol, la terrasse sur rue pour les beaux jours et en guise d’accès à la cuisine deux battants de saloon pour dégainer plus vite que son ombre, Racines, Cuisine de producteurs a l’air d’un bistrot familial émancipé en gastronomie, engagé dans le bio et fidèle à ses producteurs et fournisseurs (1).
En entrée, la polenta à la meule de pierre, lactaires à la sauce tomate, jeunes pousses de carottes, panchetta et émulsion aux girolles apporte vigueur et verdure, les coquilles Saint-Jacques rôties, mousseline de corail, risotto aux champignons et légumes bio, comme l’émincé de veau «Belle Miss’Terre» (par ailleurs un exceptionnel beurre au lait cru de Maine-et-Loire), purée à l’huile d’olive et légumes, sont des plats gourmands, cuisinés, pas revisités à la hâte, enfin la poire au sirop, mousse au praliné et glace maison, est un honnête dessert.
Le soir de mon passage, le restaurant affichait complet. Avec Sylvie, son épouse, et Stéphane, son jeune second, Bertrand Lherbette faisait parler le métier à toute vapeur. Aucune minute à perdre, aucune marche d’escalier à manquer, l’accueil prévenant malgré l’urgence pour servir «en même temps» une trentaine de clients, couper le pain, apporter le café, offrir le dernier sourire.
On se dit alors que c’est cela un restaurant, un bon, un convivial qui ne roule pas sur l’or et encore moins des mécaniques, qui vous régale sans vous ruiner, bosse droit et dur au temps des réseaux sociaux – qu’il maîtrise très bizn – des soirées Netflix et d’un personnel introuvable. Bertrand le sage au cœur vaillant se souvient du bon air de Correns mais c’est au cœur de Toulon qu’il trouve une seconde jeunesse et donne bien du plaisir.
(1) Les légumes de Bruno Cayron et Isé Crébely – Le Cayre de Valjancelle à Tourves – les fromages d’Olivier Nesty…
9 rue Corneille, Toulon. Tel. 04 22 80 27 39. Menus 30 et 36 €. Fermé mercredi, samedi et dimanche.
Parking Peiresc à 100 m.
1 comment
Racines on adore ! Toujours juste et savoureux , avec une petite pointe de surprise ! Et une équipe super sympa !