Beaulieu-sur-Mer. La belle histoire de l’African Queen

Retrouver l’African Queen… Il est toujours temps d’aborder une table au long cours et d’en apprécier l’expérience. Celle d’Annie et Gilbert Vissian règne sur le port de plaisance de Beaulieu, salle ouverte, ample terrasse (magnifique à Noël!), enseigne de film d’aventure signé John Huston (1952). Bien plus qu’une institution, une adresse de confiance, façon long métrage… Devine qui vient dîner ce soir, en technicolor ? Humphrey Bogart et Katharine Hepburn. Leur banquette est réservée pour l’éternité, tout près de l’affiche…

Le quartier “La Petite Afrique” évoque une nature grandiose mais en guise de campement voici une “brasserie luxe” que l’ethnie people – en vieux français, stars et célébrités – fréquente à l’année, parmi d’autres clientèles avisées..
​Mais pourquoi tant de fidélité ? Pour le bon sens culinaire, la qualité de l’accueil, couleurs, chaleur et boiseries. Gilbert Vissian connait le métier de longue date. Dans sa jeunesse, il apprit à Saint-André, banlieue immédiate de Nice, les fameux fondamentaux qu’on n’oublie jamais, par exemple comment sa grand’mère cuisinait la pissaladière (l’oignon caramélisé, un peu sucré!), les pâtes, les panisses… sucrées, le gâteau du dimanche… Cherchez l’enfance !
Il s’en souvint quand il ouvrit La Campanette dans le Vieux Villefranche puis lorsqu’il reprit l’African Queen en 1983. La salade niçoise, il la conjugue à tous les temps. La joue de bœuf ? Bien marinée, elle doit patienter à cuisson lente… Le marché ? Ceux de Nice et de Vintimille lui sont familiers.

Comme on le dit d’un crooner, l’African Queen joue les standards de terroir, que le chef, Olivier Bellone, interprète depuis bientôt huit ans. Incontournable pizza aux truffes, sardines farcies à la niçoise, souris d’agneau mitonnée dans un jus au romarin, polenta crémeuse au parmesan, scampis poêlés au balsamique, figues et figatelli, enfin un plateau de desserts de savoureuse constitution, tarte Tatin et Paris-Brest inclus.

Avec çà, cuvées nobles et vins amis, champagne Louis Roederer brut Premier, Blanc de Blancs des Domaines Ott, Or de Minuty ou l’amical Château de Mon Père en Côtes de Provence. A deux pas, L’Atelier d’Emile est la seconde adresse, complémentaire, version bistrot de terroir, avec soupe au pistou, poisson à la ligurienne, daube de joue de bœuf, pain perdu…

On vous aura prévenus, ici on ne parle pas plus le fooding que le mandarin oriental, mais avant tout ces quelques vérités : tradition, produit, saison, accueil, régularité.
Le service, profondément attaché à cet esprit maison, est expert et connait tout son monde, nul détail en salle n’échappe à Annie Vissian et le cœur du sujet reste, encore et toujours, la cuisine. Et si la peopolisation y est depuis longtemps en marche, elle s’invite avec discrétion et en toute confiance. Le jour de Noël et le Premier de l’An, habitués et clients-amis retrouvent chaleur et atmosphère d’adresse-refuge, salle décorée comme elle le serait en famille et – unique sur la Côte – la terrasse protégée par une forêt de sapins et guirlandes.

​Au final, cette adresse née il y a cinquante ans, métamorphosée par Annie et Gilbert Vissian, a tout d’une marque de confiance. Elle raconte une belle histoire dont un livre, préparé à feu doux, rappellera en 2019 l’esprit, les valeurs et les recettes. La fête de l’African Queen, ce long métrage de passion. Humphrey Bogart et Katharine Hepburn sont déjà invités…