Le patron a la voix qui porte et la carrure qui adoucit les moeurs. Sébastien Liprandi, un bon mètre quatre-vingt dix de sourire et d’hospitalité, est depuis onze ans «aubergiste» à Saint-Jeannet. Ce délicieux village perché se dore au pied de son Baou (1) et a vue grand écran sur la Méditerranée et ses proches collines mais c’est à deux pas de l’ancien lavoir que La Table des Baous joue sa carte gourmande.
Elle est intimiste et chaleureuse, salle aux tendres couleurs et mur de pierres, terrasse sous la treille. L’ardoise, posée au milieu de la rue ou déplacée de table en table, ne vous raconte pas d’histoires, seulement la vérité du produit et le savoir-faire d’un vrai cuisinier.
Ah, la bonne table ! Barbajuans en guise d’amuse-bouche, courgettes en tempura, farcies à la ricotta et coulis de poivrons rouges, délicat carpaccio de daurade, citron vert et coriandre, filet de loup à la plancha, courgettes et pistou, un risotto crémeux aux cèpes et seiche, enfin une généreuse pavlova, fraises et framboises… cette «cuisine au village» savoureuse et sincère fait oublier la bistronomie des villes et les gastronomies estampillées.
Fidèle à ses producteurs, Sébastien Liprandi veille au fameux «circuit court» entre collines et proche littoral. La pêche du jour est de Steve Molinari au port de Nice ou de Flavien au Cros de Cagnes, les légumes de Jean-Marie Gioanni à Gattières, les fromages de chèvre de Bruno Gabelier à La Ferme des Courmettes à Tourrettes-sur-Loup…
L’ardoise des vins parle le même langage de proximité, celui des vignobles d’aqui : Domaine Saint-Joseph de Julien Bertaina à Tourrettes-sur-Loup, Clos Saint-Joseph à Villars-sur-Var, mais d’abord les belles cuvées saint-jeannoises des frères Rasse (Longo Maï, Pressoir Romain, La Fontaine…) aux domaines mitoyens. Denis pour le Vignoble Rasse, Georges pour les Hautes Collines où Sébastien Liprandi propose en été des dîners à la belle étoile, ont chacun leur manière de vinifier et leurs domaines sont absolument à visiter.
Rue Nationale, la treille de Sébastien est un signe de ralliement et pourrait servir d’enseigne tant la vigne est inscrite dans l’histoire du village. Elle est même dans sa poésie. Les admirateurs de Jacques Prévert – il en reste ! – ont peut-être oublié la «Vignette pour les vignerons», plaquette confidentielle que le poète écrivit à Saint-Jeannet et qui fut publiée en 1951. «C’est la fête à Saint-Jeannet / Et saute le bouchon /La nature a horreur des bouteilles vides / mais elle a horreur des bouteilles pleines / quand elles ne sont pas débouchées…». Bonnes fourchettes locales ou touristes de passage, les clients ne sont pas tous poètes mais ils sont heureux à la table de Sébastien et ils le montrent, finissent leur assiette, plaisantent et savourent cette parenthèse aubergiste.
Que demander de plus, un soir d’été, sinon cette bonne cuisine et cette atmosphère bon enfant ? A l’approche des vacances mon conseil est tout simple : montez à Saint-Jeannet, au grand air et au soleil du Baou, Sébastien vous attend !
(1) Le baou est le rocher en provençal.
La Table des Baous, 42 rue Nationale, Saint-Jeannet. Tel. 04 93 24 90 63. Menus 28 € à déj. en semaine, 39.50 € à dîner. Fermé lundi et à midi le mardi et le mercredi. Site : www.latabledesbaous.fr