Chaque été, l’Hôtel Métropole Monte-Carlo cultive l’éphémère. C’est l’évasion gourmande du restaurant Odyssey, au décor signé Karl Lagerfeld. Joël Robuchon avait invité cette année la chef catalane Carme Ruscalleda. Art, modernité, Méditerranée.
Il reste quelques jours pour découvrir la cuisine de ce talent d’Espagne qui a ouvert en 1988 le “Sant Pau”, à Sant Pol de Mar, entre Barcelone et Gérone, et a conservé 3 étoiles Michelin depuis 2006 (1). Impossible, hélas, de dissocier ce moment de gastronomie de la disparition de Joël Robuchon, mort le 6 août à Genève. Il était l’instigateur de ces dîners d’été ouvrant une complicité avec quelques-uns des meilleurs chefs du monde et admirait de longue date le talent de la cuisinière de Sant Pol de Mar et la culture culinaire de sa région, qu’il connaissait à la lettre.
Le maître en habit noir, Christophe Cussac, son fidèle lieutenant depuis l’ouverture de Joël Robuchon Monte-Carlo et de Yoshi, Carme Ruscalleda et son second, Jérôme Quilbeuf : ce fut, au début de l’été, sa dernière photo dans son fief monégasque.
Autour de la somptueuse piscine d’Odyssey, on savoure la palette légère de l’autodidacte de Sant Pol de Mar, elle aussi cuisinière de la rigueur et à la sensibilité d’artiste.Il reste donc une dizaine de jours pour goûter, à dîner, la brandade de morue Mondrian, subtile mais non abstraite, petit chef-d’œuvre de saveurs et couleurs pures (rouge, jaune, vert), ou le collage chocolat de grande finesse, évoquant Picasso dans sa période cubiste.
J’ai aimé particulièrement le salmorejo – tout sauf un gaspacho ! – de tomate et de fraise aux crevettes, soupe froide andalouse revue comme une miniature, lactée de brebis et basilic. Dommage, la sole, fleur de courgette et curry, arrivait tiède, vaincue par le parcours longeant la piscine. Mais la pluma de porc ibérique au parfait fondant et aubergine rôtie faisait oublier ce faux pas, avant de plonger dans le monde de Nemo, poisson-clown dans sa bulle, exquise crème glacée à l’eau de mer et mousse d’amande.
Voilà une illustration de ce que professait Joël Robuchon: l’équilibre entre la tradition et la modernité, la créativité au service du produit et, sous la facilité apparente, le cap absolu de la rigueur. Carme Ruscalleda est ainsi un peu “robuchonienne”, le luxe est monégasque et l’instant est catalan. Magique.
(1) Dont elle a annoncé la fermeture le 27 octobre. A Tokyo, son deuxième restaurant Sant Pau a 2 étoiles depuis 2007, ainsi que Moments, à Barcelone, depuis 2012.
Photos JG et DR
Infos pratiques
- Adresse : Odyssey, Hôtel Métropole Monte-Carlo 4 avenue de la Madone 98000 Monaco
- Tél : +377 93 15 15 56
- Site : www.metropole.com
- Menu : Menu 159 €
- Carte : 180/200 €
- Fermeture : Ouv. en juillet-août, le soir seul. de mardi à samedi