Aups. « La Truffe » : Sebastian Gaillard, le talent humble

A Aups, le marché de la truffe noire commence le dernier jeudi de novembre, théâtre de la « rabasse » au rituel toujours mystérieux pour qui n’est pas dans le secret de la terre et de ses tractations. Pour se remettre de ces émotions, une bonne table ! Sans ouvrir de conflits inutiles, voici ma préférence. La Truffe!

Soit, c’est un peu cousu de gros fil – terroir, mon beau terroir – mais le restaurant de Nadine et Sebastian Gaillard n’est pas du genre racoleur et l’enseigne ne dit pas tout de la cuisine sensible de cet argentin devenu haut-varois. Pour la mériter il faut pousser haut dans la grand’rue, à l’écart de la place et de la Maison de la Truffe.

Etat civil: âge 7 ans, situé en coeur de ville, rue sans joie mais intérieur coquet, cuisine à vue, chef argentin, épouse paraguayenne… ah bon, pas de haut-varois? Vous craignez la revolucion du diamant noir mais il n’y a rien à craindre de cette gastronomie en paix.

Les huevos rotos? Comme des oeufs brouillés, pomme de terre et truffe de Bourgogne, gourmands et délicieux dans leur porcelaine blanche, un foie gras à la truffe, nuage raisin et crumble jambon tout en délicatesse, la pluma de porc ibérique, jus à la Guinness, déclinaison de pommes de terre, entre suavité et tempérament.

Enfin ne pas oublier le fromage de brebis frais (Jas du Vignal à Sillans-la-Cascade) et Figon confit (la petite figue blanche de Salernes), avant de goûter la truffe glacée.

Sebastian respecte les saisons de la truffe, ajoute en cohérence quelques notes d’évasion (manioc, gingembre…) et un parcours voyageur (Buenos-Aires, Espagne, Corse, Nice, entre autres au Boccaccio, institution créée par Gino Cannatella, Bistrot de pays à Moissac-Bellevue…) nourrit sa cuisine ajustée.

J’ai aimé la modestie de ce maître es-risotto, le naturel souriant de Nadine Gaillard, l’éclectisme de la carte des vins – cuvée Ikon du Château Hermitage Saint-Martin, malbec argentin (Aquaribay, Trivento) – le rapport qualité-prix (menu à 39 €)… Au-delà du culte exclusif de la truffe noire, cela s’appelle tout simplement un bon restaurant.