En matière de découvertes, du côté du Palais des Expositions c’est un peu morne plaine. Alors qu’il ne se lève pas un jour sans que la bistronomie n’enfante un petit génie entre le quartier du port et la place Garibaldi, ce secteur-carrefour a la tête ailleurs. Et qui connait la rue Maraldi, sinon quelques fans de Giacomo Maraldi, astronome du XVIIIe, natif du Comté de Nice ? Mais une silhouette nouvelle vient d’animer la rue, un bistrot pur jus qui carbure à la jeunesse, à l’accueil bon enfant et à la «cuisine cuisinée», pas à l’assiette de cristal.
Guillaume Tran-tu cherchait un nom pour le baptiser et il a trouvé Mallard, pensant à la Mallard 4468, locomotive à vapeur construite en 1937 par la compagnie London and North Eastern Railway. A peine éclos, le bistrot «loco» fonce à pleine vitesse avec, aux commandes, ce lutin rieur qui ne tient pas en place, plaisante, interpelle, étreint, vante les plats avec conviction et électrise la salle illustrée de plaques métal vintage.
Il rêvait d’ouvrir son restaurant et a quitté le circuit étoilé, passé – en cuisine – chez Alain Ducasse (Louis XV à Monaco, Rivea de Londres et l’ex Jules Verne de la Tour Eiffel) mais aussi à l’école lyonnaise chez Jean-Paul Lacombe. Le niçois Nino Vergez, rencontré au Louis XV et passé notamment au Grand Hôtel du Cap Ferrat auprès de Yoric Tièche, envoie des plats d’une sacrée vaillance, pâté-croûte et foie gras de canard, boudin noir-purée et pommes caramélisées, jubilatoires pommes de terre farcies à la queue de bœuf et pied de cochon, quenelle de brochet sauce Nantua, pur classique, et pour finir en pleine santé, une tarte au chocolat praliné, la fraîcheur du vacherin agrumes et bergamote ou le baba au cognac.
Je ne sais pas quelle idée m’a pris, sans doute évadée de l’enfance, mais j’ai craqué pour le vol-au-vent, ris de veau braisé et volaille fermière. A peu près disparu des popotes il est ici un plat de compétition au feuilletage fin et au bel embonpoint, rappellant l’antiquité inventée par Antonin Carême, une pâte feuilletée si légère et gonflée qu’elle s’envolait du four.
En cave, il y a du sérieux en Bourgogne et Vallée du Rhône mais aussi en Provence avec le Domaines Richaume ou le séduisant Coteaux du Verdon Myrko Tépus. Ainsi armé, Mallard cuisine plus haut qu’une table de quartier et l’addition peut voler au vent si on choisit des plats gastro ou dopés avec une râpée de truffe noire (20€ la cueillette) mais la régalade est assurée, le mot bistronomie mis en quarantaine et cette adresse brevetée Fooding pète le feu. Oh, le bon bistrot !
6 rue Maraldi. Tel. 09 85 04 99 17. Plat du jour 15 €. Carte 40/55 €. Fermé dim. et lundi.