«Ici Cognac, le guide Michelin parle aux français…». L’appel du 22 mars a bien été entendu. Après deux ans de pénitence pour cause de Covid et un mois d’inquiétude nourrie par la guerre en Ukraine qui ont profondément marqué le secteur de la restauration, Michelin a fait du Michelin. Protecteur, provincial et non parisien à l’heure de la cérémonie aux étoiles, le guide avait choisi la sous-préfecture de Charente et ville natale de François Ier comme capitale du bien vivre pour «aller à la rencontre des régions et des terroirs».
Message reçu. Le Michelin est en mission, prêchant sur tous les fronts, métiers et savoir-faire. Une fourchette à l’endroit, une fourchette à l’envers, il tricote sa tenue oecuménique, tout de même plus charitable pour l’élite que pour le bon peuple, notamment sur la Côte d’Azur. «Il fallait mettre Michelin en mouvement» a proclamé Gwendal Poullennec, le patron de tous les guides…
L’exploit de Donckele
… Et quel mouvement ! Arnaud Donckele, 3 étoiles à La Vague d’Or àSaint-Tropez en 2013 , les obtient dès la création de Plénitude, la table gastronomique de Cheval Blanc Paris. Un sens absolu du produit, la construction et l’émotion, une fidélité avec ses équipes, une modestie reconnue… Donckele est désormais au plus haut sur la Côte d’Azur et à Paris. Un exploit pour celui qui ne le cherche pas et une récompense pour l’homme et le cuisinier dont l’ascension fait l’unanimité dans le métier.
Droisneau au plus haut
Mouvement et émotion encore avec la troisième étoile confiée à La Villa Madie de Dimitri Droisneau à Cassis. Formé auprès d’Éric Fréchon au Bristol, Bernard Pacaud à l’Ambroisie et Arnaud Donckele à La Réserve de Beaulieu, il sera un trois étoiles méditerranéen solide, rassurant et inspiré, aux côtés de son épouse Marielle. Deux aubergistes des calanques pour une gastronomie de haute sensibilité.
Le bonheur de Ravin
Tout aussi réjouissant est le succès de Marcel Ravin, dont la remarquable 2e étoile au Blue Bay en Principauté de Monaco récompense un parcours créatif commencé dans une relative indifférence mais dont l’âme antillaise et la créativité sensible sont enfin reconnues. «A part du système », dit-il mais tout près du sommet. On n’oublie pas enfin le titre de meilleur pâtissier de l’excellent Lilian Bonnefoi à Louroc, le restaurant de l’hôtel ‘Eden Roc au Cap d’Antibes.
Ceto… et c’est tout à une étoile
Mais quel immobilisme à une étoile sur la Côte d’Azur ! Si on retient la première de Ceto, conseillé par Mauro Colagreco au Maybourne Riviera (Roquebrune Cap Martin), cuisine marine, architecture futuriste et panorama d’exception, on se demande si le guide avait sérieusement préparé sa tournée, squelettique dans les Alpes-Maritimes, fantômatique dans le Var (1). Une seule étoile nouvelle et un assourdissant silence qui ne traduit pas la vraie vie des bonnes tables sur la Côte, en particulier celles de la nouvelle génération.
(1) Quelques tables ont perdu leur étoile, dans les Alpes-Maritimes, où on regrette les dégradations de la Bastide Saint-Antoine de Jacques Chibois, et du Clovis à Tourrettes-sur-Loup, d’Elsa à Monaco, et dans le Var, de l’Hostellerie de Pennafort à Callas, du Faventia à Tourrette.