On n’est ni à Versailles, ni sur la Tour Eiffel, ni à Monaco, Paris, Las Vegas ou Doha mais en haute Provence, quelque part sur la planète Ducasse toujours en révolution. Moustiers-Sainte-Marie – soyons fous – pourrait être son centre du monde comme la gare de Perpignan l’était pour Salvador Dali. Pendant qu’il ajoute des images à son image (1), son « adresse de coeur » conserve simplement tout son charme.

La salle à manger, lumineuse, épurée (ph. Pierre Monetta)

La terrasse, si provençale (Ph. Pierre Monetta)
J’ai connu La Bastide encore en chantier, quand l’arrivée de Ducasse faisait l’événement. Cet extraterrestre allait-il bouleverser la vie du village ? Vingt ans plus tard, la haute Provence a survécu, le chef l’a marquée de son empreinte, interprétée par ses cuisiniers en mission et Sarah Chailan, l’enfant du pays (Manosque), a repris les rênes d’une maison qui se renouvelle sans hâte.

Une nouvelle signature (ph. P. Monetta)
Durer est un art et la Bastide y réussit même si quelques retouches ont ému cette année certains conservateurs. La salle à manger, décor et assiette, est ainsi moins « Moustiers », la cuisine s’habille plus gastro que campagne et terroir, jouée joliment par Frédéric Garnier, pur ducassien venu du Plaza Athénée. Va pour cet aggiornamento et ces notes légères ! On partage la gougère au plein air de la terrasse, si provençale, et le charme opère dans l’assiette. Dos de truite confit, betterave et baies de cassis; potiron et pot-au-feu d’escargots et girolles; turbot, jeunes carottes, algues et coriandre; cochon de montagne avec cresson en salade et maïs grillés; prune Reine-claude, caillé de chèvre glacé et pignons caramélisés… c’est serein, maîtrisé, moins dans l’affectif provençal mais à quelques virgules près l’esprit Bastide est intact.
Mathieu Bloyet, sommelier volubile, vous sert en chorégraphe un Clos Cibonne dont le cépage tibouren s’accorde à ce terre-mer. La salle dirigée par Jérôme Léonard vous met en confiance. Ni obséquiosité, luxe et decorum. On coupe toujours son pain (il vient de chez Veziano à Antibes) sans penser aux étoiles, accueil et atmosphère sont d’une maison apaisante, de celles, pas si nombreuses, où l’on revient avec le même plaisir. Et si vous êtes les hôtes du Bastidon, c’est plus de vibrations encore. Une suite de quiétude avec jardin privatif, matières brutes, lit au design japonais, porte dérobée pour accéder à la piscine. Le décor est signé Tonia Peyrot, les meubles et objets ont été chinés par Alain Ducasse… Elle n’est pas belle, la Provence ?
(1) « La Quête d’Alain Ducasse », film de Gilles de Maistre, en salles le 11 octobre.

La suite « Bastidon » (ph. Pierre Monetta)

Matières brutes et lit au design japonais (ph. Pierre Monetta)

Frédéric Garnier, du Plaza à la Bastide (photo J.G.)

L’un des plats de l’été 2017 (ph Pierre Monetta)

Pêches blanches rôties au miel et à la bière de Moustiers (ph. Pierre-Monetta)

Frédéric Garnier, Jérôme Léonard, Sarah Chailan (ph. Pierre Moneta)
Infos pratiques
- Adresse : La Bastide de Moustiers, chemin de Quinson, 04360 Moustiers-Sainte-Marie
- Tél : 04 92 70 47 47
- Site : www.bastide-moustiers.com
- Menu : Menus 52, 64 et 82 €
- Chambre : 13 ch. et suites, 215/800 €
- Fermeture : Hl et restaurant fermés mardi et mercr. seul.du 1er mars au 11 avril. Ferm. annuelle 31 oct. 2017 au 28 févr.