Avignon est un joyau culturel, une scène, un théâtre d’histoire. Mais les avignonnais connaissent-ils vraiment La Mirande ? Hôtels de luxe ou grandes tables, les beaux lieux sont souvent méconnus dans leur propre ville. Cette maison n’est pas “luxe”, plutôt un hôtel particulier qui aurait ses entrées au Palais des Papes dont sa façade baroque tutoie les murailles. A l’heure du Festival, tout client de La Mirande se sent un peu élu dans cette demeure XVIIIe que M. et Mme Stein ont sauvée de l’oubli voici trente ans.
Salons, terrasse, jardin clos, chambres raffinées aux meubles anciens, tapisseries, gravures, mosaïques, expositions d’art contemporain… l’hôtel, revu par le décorateur de L’Ambroisie, est tamisé, confidentiel, dédale de lumière et de pénombre, de l’antique cuisine en sous-sol au patio où il est toujours l’heure d’un cocktail ou d’un thé.
Dans ce lieu romanesque, un prodige en cuisine serait autant hors-sujet qu’un énervé de la food génération. Depuis le printemps 2016, Florent Pietravalle ouvre la maison d’Hannelore Stein et de son fils Martin à une modernité nouvelle et séduisante.
La cuisine de cet ancien de Pierre Gagnaire au Balzac, de Jean-Luc Rabanel en Arles et de Joël Robuchon à l’Atelier Saint-Germain, est de raison, non d’embrasement. Le cèpe, en brioche feuilletée, foie gras rôti et oignons doux confits, la langoustine sur la braise, dont le jus fait un “aigo boullido” de finesse, à la sauge citronnée, le loup en croûte d’argile aux feuilles d’agrumes… à chaque plat, on a la compréhension du produit, son approche sensible, une maîtrise sans démonstratif ni épure.
Le pigeon fumé au fut de Châteauneuf et rhubarbe confite, décliné en trois versions, est le bon exemple de ce que pourrait être le style Pietravalle. Tout se transforme, rien ne se disperse, mieux vaut l’harmonie que l’envolée, le retour aux sources sans le compromis qu’on redoutait dans ce décor d’histoire.
Le “mille et une feuilles” au boisé vanillé du chef pâtissier Clément Meiffre ou l’énigmatique coque de citron qu’il suffit de briser pour retrouver saveurs et textures d’une tarte meringuée, sont dans cet esprit.
Dans la ville épiscopale, voilà de quoi réconcilier anciens et modernes. La carte des vins, somptueuse, est passionnée de Vallée du Rhône et quelles que soient les années, au plus près des vignerons (en Châteauneuf-du-Pape bien sûr). Service attentionné et sans courbettes, grand menu à prix d’aubaine (85 €), menu déjeuner à 39 € et la “Table haute” de Séverine Sagnet pour l’esprit table d’hôtes… La Mirande est ainsi. Pas d’étalage mais une atmosphère hors du temps, le lien entre histoire et présent, une belle maison comme on dit une “belle personne”. Enfin, l’effet Piétravalle qui redonne du sens et l’espoir d’une étoile, que la table a perdue en 2012. Ce serait, disent les murs, la conviction des neuf papes qui ont régné sur Avignon, dont Urbain V, passionné de jardins et de vergers. Son encyclique serait même parvenue chez Michelin…
Infos pratiques
- Adresse : 4 place de l'Amirande, 84000 Avignon
- Tél : 04 90 14 20 20
- Site : www.la-mirande.fr
- Menu : Menus 39 € à déj., 60, 65 et 85 €
- Carte : Env. 120/150 €
- Chambre : 27 ch. Env. 300/480 €
- Fermeture : Fermé mardi et mercredi