Au commencement était le Grand Hôtel, construit en 1903 au plus haut du village, imposante silhouette par dessus les toits, bientôt exposé aux vents de l’Histoire, transformé en hôpital à la Première Guerre mondiale, réquisitionné par les Allemands au cours de la Seconde, échappant à un incendie majeur en 1965. Ces mauvais jours sont oubliés et une nouvelle vie a commencé lorsque Monika et Juvenal da Cunha, propriétaires de deux hôtels à Lyon et créateurs du groupe Mona Collection, l’ont racheté en 2019.
Dix-huit mois plus tard, sa rénovation achevée, rebaptisé Eden Rose – Grand Hôtel, du nom de la variété qui a inspiré sa décoration, il renait en seigneur des collines au parc de trois hectares, chambres plein sud, piscine à flanc de restanques et vue d’exception sur les Iles d’Or. La proximité du paradis…
Depuis mi décembre, la cuisine du restaurant l’Eden Flow est confiée à Burak Kilic qui fut chef du Mama Shelter d’Istanbul puis à Lyon sous la même enseigne et second à la table du Château de Bagnols, au cœur des vignobles du Beaujolais. Dans la salle illuminée par une fresque aux mille couleurs de l’artiste brésilien Paulo Dias, elle répond avec mesure à l’atmosphère du lieu. Dès le choix des entrées, avec un attendu mais réussi pâté en croûte ou un royal de foie gras, brioche et œufs de poisson plus incertain.
La carte du moment proposait, mi janvier, un demi magret de canard rôti, mousseline de panais et tombée de chou kale, le filet de daurade à la plancha, carottes fane et mousseline de chou-fleur fumé ou un filet de bœuf Rossini, purée de carottes au miel et pommes de terre grenaille à la truffe. J’ai choisi le versant sud avec un risotto, langoustines et Saint-Jacques snackées, mousseux, généreux, douceur marine avant la légèreté d’un millefeuille, façon tarte au citron revisitée.
Ni gastronomie d’altitude ni mode hors contrôle, ménageant tradition et modernité, cette cuisine semble s’abstenir pour l’instant de références au terroir (1) où elle puise quelques belles cuvées de littoral (Château Léoube, Figuière, Sainte-Marguerite…). On la découvrira mieux encore aux beaux jours, sur la terrasse panoramique aux pins majestueux qui est la signature de cet hôtel de charme dirigé par Aurélien Herry. Il s’exprime sans arrogance ou excès de design, respectueux de l’histoire, de l’environnement et du lien renoué avec l’un des plus beaux villages de la Côte d’Azur. Un sage !
(1) Bormes les Mimosas, où il a tenu La Tonnelle des délices et Le Jardin de Perlefleur, est le village-patrie de Guy Gedda, enfant de Marseille et maître de la cuisine provençale.
Eden Flow à l’Eden Rose – Grand Hôtel, 167 Route du Baguier. Tél. 04 22 14 65 30. Menus 47 et 55 €, carte 60/70 €. Brunchs mensuels (prochain le 6 février), bar-lounge . Hôtel 4 étoiles, 47 ch. À partir de 189 €. dont la 312, parquet de chêne, terrasse et vue exceptionnelle dès le soleil levant. Spa, séminaires. Ouvert à l’année.