Commençons par un lieu commun: les grandes adresses ne meurent jamais… Oui mais cette facilité n’est pas une vérité et bien des tables majeures se sont effacées sans espoir de retour. Le Bacon créé en 1948 par la famille Sordello semblait pourtant hors d’atteinte. Un cap cousu d’or, la vue panoramique sur le Vieil Antibes et l’horizon des Alpes, la Méditerranée et ses poissons, bourride, chapon «façon Grand’mère», bouillabaisse grand bleu dégustée avec le tablier, le tout tarifé par Neptune en personne…
La belle histoire de l’ancienne guinguette devenue star se terminait pourtant par une vente en 2019 et en deux ans les repreneurs n’eurent pas le temps de convaincre. La suite marque sa vraie renaissance. Laurent le Fur, qui fut notamment président de la Maison Lenôtre et directeur général des restaurants de la Tour Eiffel, apporte son expérience à cette adresse-culte rebaptisée Maison de Bâcon et lui promet un futur ambitieux et rassurant.
C’est d’abord en cuisine que le restaurant nouveau réconforte : ni patrimoine en dévotion, ni atterrissage d’ego surdimensionné mais la compréhension du lieu et de son caractère unique. Pour le ressusciter, Laurent le Fur a trouvé le maître de cuisine qui convenait avec Nicolas Davouze, «Bocuse d’or France», resté modeste malgré un cv doré (Bocuse, Ducasse, Labbé, Marcon, Goujon, Fréchon, Férigutti, Gagnaire… enfin aux côtés d’Alain Montigny à l’ex Oasis).
Elle a convaincu très vite avec la minute de rougets, artichauts poivrade à la menthe et coriandre, un carpaccio mariné, condiment citron et grenade, le poulpe confit au feu de bois, girolles acidulées, l’ombrine de Méditerranée aux algues, sauce verveine , la daurade en croustillant, beurre de cèpes et Xérès, cassolette de champignons, enfin les petits choux à la pâte à tartiner ZK de Catherine Brothier (le restaurant des Arcades à Biot), mousse mascarpone et caramélisé noisette.
Avec ce chef de confiance, La Maison de Bâcon peut s’autoriser une gastronomie que la maison d’antan n’avait pas abordée et qui répond aujourd’hui au projet de rénovation et d’extension engagé par Laurent le Fur. La salle a retrouvé sa charpente d’origine, propose lounge-bar, cuisine apparente et aquarium XXL, la véranda sera bientôt agrandie, ouvrant sur un nouveau jardin en terrasse et, plus tard, viendront un roof-top pour l’événementiel et une restauration plus abordable. C’est cette maison marine, sérieuse, séduisante qu’il faut (re) découvrir, comme il faut encourager cette ambition nouvelle qui honore Antibes, son Cap et son histoire.
664 Bd de Bacon.Tél.04 93 61 50 02. Menus 75 € à déj. en semaine et 145 €. Env. 90/120 €. Bouillabaisse 115 et 150 € (avec langouste). Fermé lundi, mardi.